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Jean Luc Van Den Heede

Le Site Officiel
 

Global Challenge : Echanges sur la navigation

VDH
 
Pour remonter contre le vent il faut tirer des bords, en moyenne, tu tiens un cap pendant combien de temps ?
Il n’y a pas de règles, mais bien évidemment, il faut ménager ses forces, sur une si longue route... un bord peut durer 1 ou plusieurs heures ou même plusieurs jours dans les alizés.
Si tu veux changer une voile, ça prend combien de temps et quel est son poids ?
Ma grand voile pèse 160 Kg, la changer n'est plus possible... il faut qu'elle soit solide. Par contre je peux changer les voiles d'avant qui sont sur enrouleur.
Quelles sont les manœuvres les plus fréquentes ?
Le virement de bord contre le vent ou l'empannage.
Pour virer de bord contre le vent il faut vider le ballast au vent et remplir celui sous le vent. Ensuite, comme dans un voilier classique, on pousse la barre et on fait passer la voile d'avant de l'autre côté sans oublier les bastaques. Le plus pénible est de reborder le génois qui fait 170 m².
Pour empanner sous spi, il faut rentrer le spi dans sa chaussette, ranger le tangon, faire passer la grand voile de l'autre côté sans oublier les bastaques, remettre le tangon, renvoyer le spi de l'autre côté et régler le tout. Si tout va bien il y en a pour 1 heure.
Après cela, on mérite bien un carré de chocolat !
Combien de temps passes-tu à la barre en moyenne par jour ?
Je ne barre qu’aux allures portantes (vent de travers, et vent arrière) avec beaucoup de vent (au-dessus de 30 nœuds), ça augmente les moyennes. Dans ces conditions, je peux barrer une journée entière. Un tour du monde dans ce sens implique beaucoup de vent de face… le pilote barre aussi bien que moi dans ces allures.
Comment fonctionnent tes instruments ?
Tous mes instruments, du GPS à ma radio, en passant par les téléphones, les sondeurs ou autres ordinateurs portables, consomment de l'énergie. C’est considérable et impératif au succès de ce défi. Je dispose de plusieurs panneaux solaires, d'éoliennes, et de 2 moteurs VOLVO équipés d'alternateurs pour recharger ma panoplie de batteries OLDHAM.
Pour raccourcir ton trajet tu vas te rapprocher du Pôle Sud, quelles températures vas-tu devoir affronter ?
Dans le sud, la température extérieure peut varier entre +15° les jours de très beau temps, à -5°... mais dans ce sens, il y aura le vent en plus !
Dans le bateau, Sani-chauffage me permet de ne pas trop souffrir du froid. Quand on met le nez dehors, il faut se couvrir, et avoir le sang chaud !
Je suppose que la météo joue un rôle primordial dans la réussite de ton défi, comment accèdes-tu aux informations ?
Des cartes météo sont émises par pratiquement tous les pays, à des heures fixes, et il suffit que je branche mon récepteur de fax météo pour les obtenir. De plus j'ai accès à Internet et à tous les sites météorologiques.
En fonction de ces prévisions et de mes observations du ciel et de la mer, je prends les options qui me paraissent les plus judicieuses.
Quels sont les dangers à éviter ?
Le plus grand danger, c’est la chute à l’eau. Je m’attache quand je le juge nécessaire, par exemple quand je suis à la barre par mauvais temps, car c’est à la barre qu’on est le moins attentif, et une grosse vague peut vous emporter. Le froid et la fatigue provoquent une perte de concentration, et on ne s’en aperçoit pas.
L’autre grand danger, c’est la glace. Les icebergs ne sont pas toujours repérés par les radars, et encore moins les growlers ( morceaux de glace qui se détachent des icebergs). Dans une coque comme celle d’Algimouss, en sandwich, heurter un growler c’était percer la coque... Aujourd'hui mon bateau est en aluminium, donc beaucoup plus résistant.
Dangereuse aussi, la rencontre avec des containers tombés des cargos qui flottent entre 2 eaux ou avec une baleine ou encore un cargo dans des endroits fréquentés comme le rail d’Ouessant. Lors de ma première tentative, la rencontre avec un OFNI (objet flottant non identifié) a causé de tels dégâts que j'ai du renoncer d'où mon choix de l'aluminium.
Utilises-tu encore le sextant ou choisis-tu les moyens modernes (GPS et autres)
J'utilise les moyens modernes bien sur! c'est tellement plus facile. Le GPS est une vrai révolution. Par contre j'emporte toujours mon bon vieux sextant car lui ne tombera jamais en panne! S'il le fallait se remettre au sextant ne serait pas un problème. J'en ai donné tellement de leçons!
En communication je prends aussi tous les appareils par satellite: standart C, Mini M, et sandart B
Jusqu'à quelle latitude compte tu descendre?
A l'époque où je pars, je vais arriver au printemps dans le Pacifique. J'espère que le pack glaciaire n'aura pas eu trop le temps de fondre pour former des icebergs. Par contre je ne pourrai pas descendre à cause de ce pack au dela de 55° au niveau de la mer de Ross.
Comment produis-tu ton énergie
D'abord j'utilise au maximum les énergies douces: 2 éoliennes à l'arrière d'ADRIEN et des panneaux solaires dans la partie ensoleillée donc agréable de l'atlantique.
Autrement j'ai 2 moteurs VOLVO de 50 CV. qui me fourniront l'electricité complémentaire et me permettront de maintenir toujours en bonne état mes batteries OLDHAM.
Je vais prendre environ 250 litres de Gazole stockés dans la quille pour les faire tourner quand cela sera necessaire
Qu'est-ce qu'une "cellule de vie basculante"
Quand un voilier gite (penche) sous l'action de ses voiles, tout penche à l'intérieur... Pour remédier à cet inconvénient, mon intérieur (c'est à dire ma table à carte,ma couchette et ma cuisine) que j'appelle mon loft ! peut se régler et se remettre à l'horizontal. Desjoyaux avait le même système au dernier VENDEE GLOBE.
Quelles sont les différences dues au fait que le bateau soit en alu?
L'alu est plus bruyant et plus humide qu'une construction classique en verre. Aussi je l'ai bien isolé thermiquement et phoniquement. Le bruit n'est pas plus important que dans un bateau carbone. La conduite du voilier n'est pas différente. Simplement du fait de sa taille s'est beaucoup plus physique. Je pense que surtout dans ces tailles, l'alu est le meilleur rapport vitesse, prix, sécurité.
As-tu un gyro compas?
Bien sur, les pilotes SIMRAD (ex Robertson) sont commandés par un mini gyro. C'est indispensable dans le sud lorsque l'on se rapproche des pôles, sinon le cap du bateau avec un compas traditionnel ou fluxgate est délirant!
Qu'est ce que le "Mast Jack"?
Les mâts traditionnels sont tenus par des haubans (câbles) qui sont tendus par des ridoirs. Plus on visse les ridoirs, plus le câble est tendu.
Sur les grands bateaux, les tensions sur les câbles deviennent si importantes que l'on n'a pas la force suffisante pour tourner les ridoirs et les visser.
Aussi on fait, 40 cm. au dessus du pied du mât, un trou dans le carbone de chaque côté, très renforcé par 2 plaques en inox vissées. Dans ces trous, on introduit un gros barreau d'acier inox (le MAST JACK) qui traverse et dépasse des 2 côtés, sous lequel on positionne un vérin de chaque côté. Pour finir de tendre les haubans on pousse avec ces vérins tout le mât vers le haut et on glisse sous le pied de mat des plaques qui l'empêchent de redescendre.
Si vous cliquez sur photos et que vous agrandissez le pied de mât dans sa caisse rouge, vous voyez parfaitement la plaque d'inox dans laquelle s'enfile normalement le mast jack, elle est anormalement encastrée dans la base du mât. On voit aussi sur le mât à droite que, de l'autre côté, il est cassé juste en dessous de cette ferrure. Le mât s'est désintégré sous ces 2 plaques d'inox.
Enfin à gauche de la photo on distingue les plaques d'alu qui se glissent sous le mât pour tendre les haubans.
A titre indicatif, sur Adrien la force exercée vers le haut grâce aux vérins pour tendre le haubanage est de 40 tonnes.
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